Jean-Michel Abimbola : « Justicier, préférant la mort à l’oppression coloniale, Bio Guera nous laisse en héritage le sens de sacrifice de soi »
[Bénin Revélé Mag] – Le Président de la République, Patrice TALON, a présidé le samedi 30 juillet 2022, la cérémonie de dévoilement de trois monuments. Ici, l’intégralité du discours du ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts, Jean-Michel Abimbola au dévoilement de la statut de Bio Guera. Pour lui, la réalisation du monument Bio Guera s’inscrit dans la logique de valorisation de l’histoire culturelle et politique du Bénin, mais également de l’identité historique du Bénin.
Monsieur le Président de la République ;
Messieurs les anciens présidents de la République,
Madame la Vice-présidente de la République ;
Mesdames et Messieurs les Présidents des institutions de la République ;
Mesdames et Messieurs les Ministres ;
Excellence Mesdames et Messieurs les chefs de missions diplomatiques ainsi que les représentants des Organisations internationales ;
Honorables Députés à l’Assemblée nationale ;
Mesdames et Messieurs les invités spéciaux ;
Majestés, Têtes couronnées et Responsables religieux ;
Mesdames et Messieurs de la presse ;
Distingués invités, en vos titres, rangs et qualités, Mesdames et Messieurs ;
Le projet de société “BENIN REVELE” traduit dans le Programme d’actions du Gouvernement implique une réappropriation des potentialités culturelles et des séquences glorieuses (et parfois douloureux) de l’histoire du pays. Le Gouvernement affiche clairement une volonté politique de rétablir dans les consciences individuelles et collectives cette identité historique de nation forte et de peuple brave qui nous caractérisait et qu’il nous faut retrouver pour bâtir une société prospère, unie et fière.
Une structure en acier sur un massif en béton armé pesant treize tonnes
La conception et la construction de la statue de Bio Guera nous offrent l’occasion de révéler au peuple béninois et au monde entier la charge symbolique de l’histoire de notre pays et l’épopée d’un illustre personnage qui incarne l’intégrité, la bravoure et l’héroïsme, toutes choses nécessaires à la construction d’une nation forte et digne.
La statue de BIO GUERA est située sur le rond-point de l’Aéroport international de Cotonou. Elle est composée d’une enveloppe faite de fonte (cuivre T3) d’une épaisseur moyenne de 5mm montée sur une structure en acier, l’ensemble reposant sur un massif en béton armé pesant treize (13) tonnes hors socle. La hauteur totale du monument est de 10m dont 10m en longueur, 3m en largeur et 7m de hauteur pour la statue elle-même.
La réalisation du Monument Bio Guera s’inscrit dans la logique d’asseoir d’avantage l’identité historique et de valoriser l’histoire culturelle et politique du Bénin.
De son nom de prince Wasangari Gbaasi N’Guera, le futur Bio Guera était un cultivateur dévoué à son travail à l’exemple de plusieurs de ses congénères. Son père est Sabi Yerima et sa mère est Yͻn Gͻn. Eduqué à monter à cheval, à manier l’arc et les flèches, à servir comme guerrier de réserve de l’armée du roi de Nikki, il ne nourrit aucune ambition politique sauf à voir prospérer ses immenses champs de céréales et de tubercules.
Certes, les descendants baatonnu, dans leur littérature, continuent d’entretenir sa mémoire et les arts de la scène, notamment le théâtre, réécrivent à volonté son histoire. Mais, il demeure que son parcours et ses œuvres restent inconnus du grand public. Les nouvelles générations ont peut-être entendu parler de lui, mais elles ignorent la nature de ses combats et les idéaux qui ont nourri son engagement.
Une vie pleine, partagée entre ses activités paysannes et marchande.
Personnage atypique dans l’historiographie du Bénin, connu pour avoir été distingué en 1975 « héros national », sa résistance contre le colonisateur français qui, au terme de l’expédition militaire contre Béhanzin en 1894, avait voulu soumettre les peuples Wasangari, Peul et Baatonnu de l’ancien territoire du Baru-tem, est citée comme un acte de résilience exemplaire.
De sa naissance en 1856 à sa disparition le 17 décembre 1916, Bio Guera aura vécu une vie pleine, partagée entre ses activités paysannes et marchande. Avec les exactions de l’armée coloniale sur ses terres, il devient un activiste et son engagement politique se transforme en rébellion armée puis en force de résistance.
Bio Guera ne s’est pas fait prier pour faire partie des figures de la guerre de résistance des Baatombu à la pénétration française. Il est rentré dans l’histoire pour sa détermination à libérer les populations du Borgou, les Baatombu et les Boowo des privations de liberté, de l’impôt de capitation, de la conscription, du travail forcé et des exactions diverses dont elles étaient victimes sous l’administration coloniale.
Justicier, préférant la mort à l’oppression coloniale, il nous laisse en héritage le sens de sacrifice de soi pour l’intérêt collectif. C’est bien dans cet état d’esprit qu’il se donna corps et âme à la guerre à Baura, à douze kilomètres au nord de Bembéréké.
Traqué, épuisé par toutes ces années de rébellion, le prince révolté finit par être repéré dans une de ses retraites et est tué le 17 décembre 1916.
En érigeant ce monument à un endroit aussi stratégique que le rond-point de l’Aéroport international de Cotonou, le Gouvernement entend offrir au visiteur l’un des symboles les plus expressifs de l’identité historique de notre pays.
En posant cet acte, c’est toute la dimension nationale du personnage qui est ainsi mise en évidence. Car ce n’est pas seulement sur le lieu de ses exploits ou de sa naissance que ce monument devrait être érigé. Cette œuvre, en effet, trône à plus de cinq cent soixante-quinze (575) kilomètres de Kalalé, la terre natale du héros et à près de cinq cent vingt (520) kilomètres de Bembèrèkè où il a trouvé la mort.
L’hommage à ce personnage constitue une présentation des éléments patrimoniaux de notre mémoire collective : par l’arme qu’il tient, par le costume qu’il porte, par les décorations qui ornent son cheval, le personnage déroule et montre la culture dont il fut le produit.
La mémoire collective retiendra de ce personnage d’exception les marques de témérité et de dignité des Wasangari, marque à laquelle s’identifient et doivent continuer de s’identifier les femmes et les hommes de notre nation.
Vive Bio Guera !
Je vous remercie !